vendredi 4 avril 2008

Arrière-boutique

Tu sens cette odeur ? Celle des entrepôt de mort. L'odeur saturée du sang, de la graisse en abondance. L'odeur de la chair vive, nue, l'odeur du suintement que le froid n'atténue pas. C'est ça que sent ma pensée. Ca sent l'écorchure sale, la gangrène et la chair putrescente, verte.

"Je mange de la viande et le monde est violent."

Autrefois, j'étais quelqu'un de bien. J'ai eu des amis, et ils m'ont apprécié. J'ai eu un sourrire qui leur a plu. Mais tout ce qui est bon est voué à crever. La générosité tue. L'altruisme est pris pour de la soumission. La bonne humeur rend les misérables plus aigres, le bonheur fait de toi la cible de tous ces poux rongés d'égoïsme et d'envie, sur le compost démocratique ambiant. Ce qui est bon attire le mal.
Maintenant, je veux que mon odeur attaque, que ça pique jusqu'à saigner du nez, une putain de belle grosse hémorragie nasale à vous vider les veines - jusqu'à faire basculer la petite logique égoïste du moindre effort : il faut que "réagir" soit plus facile que fermer les yeux et se laisser porter dans le caniveau, pour tous ces branleurs de caniveau.

Un long travail de traque.
Dans la rue, l'odeur de la peur, les phéromones du stress, la panique puante et poisseuse.
Au travail, la soumission craintive, les jappement et les fesses écartées sur des colliques tremblantes.
Devant la télé, la masturbation devant un documentaire animalier, une pub ou un talk show.
L'utérus accueillant de la femelle du chacal. Le cul moelleux frotté au savon qui ne dessèche pas la peau. La poitrine ostensiblement offerte d'une animatrice qui bredouille et se penche en avant pour mieux lire le prompteur.
Il essuie piteusement son ventre avec un kleenex parfumé à l'Eucalyptus. Il essuie ses poils englués, honteux, son sexe mort, son gland mou vomissant de longs filets de miasmes blanchâtres.
Il se rappel que, l'espace d'un instant, il a eu des pensées qui le dépassent. Il s'est vu dominer l'objet de ses désirs. La femelle du chacal qui jappe lorsqu'on la pénètre, la surprise du cul savonné soudain pénétré, les cheveux tirés de l'animatrice suppliante.
Il s'est vu le maître, et en déchargeant, un paradis blanc qui tombe en goutte sur sa bedaine débraillée. Retour à la vérité sordide de sa petite misère honteuse.
Il n'y a même pas de chacal, encore moins de femelle.

Il faudra se venger, se rassurer en écrasant tout ce que l'on peut.
Harcelée, la stagiaire. Engueulée, la caissière. Dénoncée, la secrétaire.
Partout on le cherche et on l'exploite, son petit pouvoir merdique d'objet d'une république en plein déclin, de sujet d'une démocratie décadente où on peut tout dire quand on n'ose rien faire.

Les vers charognards rongent la carcasse du monde saigné à vif, et la gangrène puante qui coule sur leur petit corps entortillé ne semble pas les déranger dans leur besogne molle.

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